L’appréciation de soi : l’autre versant de l’auto-compassion Parfois, il est plus difficile de voir ce qui est bien chez nous plutôt que ce qui ne va pas. Pour certains d’entre nous, penser à qualités nous met mal à l’aise. Les louanges et les compliments peuvent être facteur de gêne et nous ne savons souvent pas comment réagir sans timidité. Combien d’entre nous savent réellement accepter les éloges? Pour toute une série de raisons, il est souvent plus difficile que nous ne le pensons d’avoir une image positive de nous-mêmes ; lorsque l’on creuse, l’on tombe souvent sur de la peur. Une peur qui implique des attentes trop élevées. Minimiser nos traits positifs signifie que nous sommes plus susceptibles de surprendre agréablement les autres en faisant bien plutôt que de les décevoir en faisant mal. La peur aussi d’être perçu comme prétentieux ; personne n’aime un narcissique à part le narcissique lui-même. Célébrons nos qualités Alors, comment célébrer nos qualités de manière saine ? Je crois que la réponse réside dans un autre versant de l’auto-compassion. Il s’agit ici, de la même façon que lorsque nous observons nos insuffisances (de nous traiter avec gentillesse, avec un sens de l’humanité commune et de la pleine conscience), de faire de même avec nos traits positifs : ce que l’on pourrait appeler «l’appréciation de soi». Lorsque nous pouvons apprécier ce qui est bon en nous, en reconnaissant que tout le monde a des forces et des faiblesses, nous nous permettons de nous délecter de notre bonté sans évoquer des sentiments d’arrogance ou excès de confiance. Prendrions-nous les bonnes qualités de nos amis pour acquises sans jamais les reconnaître ou faire savoir à ces amis ce que nous aimons chez eux ? Probablement pas, mais beaucoup d’entre nous le faisons vis à vis de nous-mêmes. C’est un grand cadeau de bienveillance que de nous apprécier et de démontrer notre approbation par des éloges sincères. Nous n’avons pas besoin de faire ces louanges à haute voix. Mais nous pouvons tranquillement nous donner une reconnaissance intérieure que nous méritons. Apprécier la bonté des autres tout en ignorant la nôtre crée une fausse division entre eux et nous. En tant que représentant de la condition humaine universelle qui anime toute notre expérience, nous honorons celle-ci dans son ensemble lorsque nous nous honorons nous-mêmes. Ne pas s’identifier à nos talents Comme l’écrit le maître zen Thich Nhat Hahn : « Vous êtes une merveilleuse manifestation. L’univers entier s’est réuni pour rendre votre existence possible. » Célébrer nos réalisations n’est pas plus égocentrique que d’avoir de la compassion pour nos échecs. Nous ne pouvons pas vraiment revendiquer la responsabilité personnelle de nos dons et talents. Ils sont nés de nos gênes, de l’amour et de l’éducation de nos parents, de la générosité d’amis, des conseils d’enseignants et de la sagesse de notre culture collective. L’appréciation de nos bonnes qualités est donc vraiment une expression de gratitude pour tous ceux qui nous ont façonnés en tant qu’individus. L’appréciation de soi honore humblement ceux qui nous ont aidés à devenir la personne que nous sommes aujourd’hui. La pleine conscience de nos qualités L’appréciation de soi implique également la pleine conscience. Tout comme nous devons remarquer les qualités des autres afin de les apprécier, nous devons consciemment reconnaître nos propres caractéristiques positives. Cependant, nous sommes souvent tellement concentrés sur nos erreurs et nos défauts que nous ne voyons même pas quand nous faisons les choses correctement. Que remarquons-nous le plus lors d’une évaluation professionnelle, les neuf points d’éloge ou le seul point de critique ? Si nous adoptions une vision biaisée de nous-mêmes – “Je suis parfait et je n’ai aucune faiblesse” – ce serait certainement un problème. Mais la vérité est que chaque être humain a des traits à la fois positifs et négatifs. Ni mieux ni pire. La clé est d’avoir un équilibre et une perspective qui nous permettent de nous voir sans distorsion. William James, l’un des pères fondateurs de la psychologie occidentale, a écrit un jour que “Le principe le plus profond de la nature humaine est le désir d’être apprécié.” Heureusement, nous pouvons répondre à ce besoin essentiel sans dépendre de l’approbation des autres. Lorsque nous nous traitons avec la même gentillesse avec laquelle nous traitons nos bons amis, nous avons alors le soutien et les soins nécessaires pour nous aider à prospérer.